Commentaire de Scoop.it – Cultures numériques
Sauf pour les cabinets de juristes et d’avocats… c’est en tout cas le commentaire que j’ajouterai à l’entretien Eric Schmidt pour le site AllThingsD rapporté par Numerama et où il a déploré le laxisme du système actuel des brevets qui permet à n’importe qui de breveter n’importe quoi.
Il devient de plus en plus évident que la course au brevet est en train de stériliser l’innovation et sa démocratisation à plusieurs niveaux.
Recherche
Aujourd’hui on pousse les chercheurs à produire du brevetable dévalorisant ainsi la recherche fondamentale au profit de la recherche appliquée. On produit ainsi une recherche à court terme qui positionne se positionne au service de l’industrie avant d’être au service du bien commun. Ainsi on développe, y compris et surtout malheureusement dans la recherche publique des pratiques d’enclosures de la connaissance. Mais pire les chercheurs sont pris dans des logiques paradoxales où ils sont évalués sur leur publication mais doivent en parallèle veiller à masquer ce qu’ils font pour protéger leur (soi-disant) avance stratégique vers de potentiels brevets. Ainsi leurs travaux sont moins soumis au retour fécond de la communauté (voir http://www.transfert.net/Trente-scientifiques-contre-les).
Industrie
La brevabilité déséquilibre le développement industriel lorsque le brevet est déterminant, créant de la “survaleur” pour le breveteur qui prend un avantage économique décisif sur ces concurrents (mais on y revient au niveau suivant). Du point de vue industriel, on se retrouve dans une bureaucratisation de l’ingénierie, car nous sommes désormais au-delà de la question du dépôt de brevet, mais dans la veille portée à ne pas enfreindre de bonne foi des brevets discrets ou des brevets sur le banal. Eric Schmidt indique que chez Google ce sont des milions de dollars qui sont ainsi dépensés. Bureacratisation et coût d’autant plus importante que l’éclatement des législations nationales dans un marché mondialisé aboutit à devoir s’armer de service juridique et technique tellement multi-compétent, que les petits innovateurs sont disqualifiés d’emblée (mais ce n’est pas nouveau, c’est vieux comme le téléphone de Meucci)
Économie
Le brevet paralyse la concurrence. On argumentera qu’il privilégie l’innovateur (mais nous venons de le voir l’innovateur désormais n’est plus (ou ultra rarement) un acteur émergent. Le brevet est en fait une arme stratégique pour bloquer la concurrence et se pour générer des revenus (on se rappellera comment Apple a pratiquement dû sa survie au début des années 90 grâce au finacement de microsoft… Le brevet va donc bloqué les opportunités d’une économie concurrencielle pouvant bénéficier aux usagers. On trouvera notamment à l’université de Boston, des auteurs qui dénoncent le coût social et privé des brevets (The privae and social cost of patent trolls).
Morale
La brevabilité devient un secteur ou le troll devient référence, ou l’accaparement du banal et sa privatisation (breveter l’utilisation d’un doigt ou de deux… personnellement je fais des trucs de ouf avec trois et Djian pourrait à son tour breveter la fourche du diable… un usage que j’ai dû croiser dans un de ses bouquins…). Donc d’un côté le brevet confisque l’émergence pragmatique de l’usage et de l’autre il tue le bon sens permettant de plus en plus d’attaquer l’usage “non-breveté” (mettre son chat à sécher dans un micro-onde).
Mes remarques restent ici à l’emporte pièce, et je ne peux que recommander de s’intéresser aux initiaitives qui luttent contre l’augmentation de l’étendu des brevets.
Quelques liens et références complémentaires:
- Brevabilité en Europe : http://eupat.ffii.org/
- NoSoftwarePatent : http://www.nosoftwarepatents.com/fr/m/intro/index.html
- Bibliographie autour des biens communs (une alternative à la pensée des Brevets) :[zotpress userid=47183 collection=”DVEPH3UV” sortby=”author”]
Article inspiré par l’actualité de www.numerama.com