Je ne suis pas bien dans la Teams, billet ouvert à la présidence de l’université Lyon2 et la direction de l’ICOM

Bye bye l’équipe

(MAJ 9/12/20 : Je tiens à signaler et remercier la directrice de ma composante qui depuis la publication de ce billet a été attentive aux choix d’outils pour nos visios en mettant de côté l’application que je critiquais)

Madame la Présidente de l’Université Lyon2, Madame la Directrice de l’ICOM de la même université, je vous adresse ce billet ouvert pour vous manifester mon refus à l’avenir d’utiliser Teams dans le cadre de nos réunions internes dans le cadre du confinement (ou pas).

Après avoir dû utiliser ce dispositif à plusieurs reprises, j’ai pu constater qu’il impliquait l’acceptation de sollicitations numériques et de potentielles exploitations de données qui ne me paraissent pas nécessaire à la tenue de nos réunions, jurys et autres rencontres collectives virtualisées du fait du confinement.

Notre université a mis en place des outils de visioconférences dont l’opérationnalité et les fonctionnalités sont tout à fait acceptables et permettent de respecter la confidentialité de nos échanges, le traitement autonome et localisé de nos données personnelles.

La procédure de connexion à la plate-forme Teams incite, par des moyens déloyaux et ambiguës, les utilisatrices et utilisateurs à transmettre des données personnelles comme un numéro de téléphone ou une adresse personnelle pour nous garantir l’accès à la plate-forme si notre compte professionnel n’était plus opérationnel. Ceci implique un croisement de données par ce tiers qui ne me paraît pas légitime. Bien sûr ce n’est pas obligatoire. Mais la formulation suggère que vous prenez des risques à ne pas le faire.

A priori c’est votre organisation qui demande
Mais c’est Microsoft qui opère la récupération

Si vous n’acceptez les recommandations définitivement, elles sont systématiquement reproposées avant chaque connexion. C’est un harcèlement d’autant plus pernicieux qu’il se produit à l’arrivée d’un rendez-vous et où la réponse systématique à ces sollicitations fragilise notre ponctualité et donc augmente notre niveau de perméabilité aux injonctions de cette entreprise-opérateur.

Utilisateur d’un environnement informatique GNU/Linux, je ne peux me connecter via l’interface web, ce qui implique des adhérences plus profondes à l’éco-techno-système de l’éditeur de dispositif. Cette inopérabilité via le web ne se découvre que lorsque vous arrivez au bout de la procédure d’identification et sollicitation évoquée précédemment. On ne vous explique pas d’emblée que ça ne marchera pas. On vous propose de donner vos données personnelles avant de vous indiquez que ça ne marche pas!

Voilà ce qui arrive à un linuxien voulant passer par son navigateur web dernière génération

La solution est donc de passer par le « client Linux » de l’éditeur. D’après les éléments qui sont à ma disposition, ce client est un navigateur web intégrant les composants spécifiques à la connexion avec le dispositif Teams.

Recommandation d’utiliser l’application plutôt que le web

À cette différence près, que le client en question à une consommation de ressources deux fois supérieures à celle des navigateurs courants.

Ce client est par ailleurs persistant et là encore sans vigilance de la part des utilisateurs et utilisatrices, il s’exécute quasi silencieusement en permanence. Lors de la première utilisation, se propose de démarrer avec le système et lorsque vous fermez la fenêtre, il reste actif et ne peut être stoppé totalement que via son icône dans la zone de notification.

Le oui est exemple de nudge design (effet visuel attractif) et la persistance malgré le fait d’avoir fermé la fenêtre

Même lorsqu’elle n’est pas utilisée, l’application va donc occuper des ressources du système au détriment des autres applications, va entretenir un lien de veille avec la plate-forme Teams et donc suivre le journal de vos connexions (en lieu et heure). Le tout en trompant les utilisatrices et utilisateurs sur la réactivité de l’application : Sentiment que l’application démarre vite … mais non, c’est juste que vous n’êtes jamais déconnectés (enfin on pré-suppose qu’au moins nos webcams et micros ne sont pas utilisés à notre insu – il n’y a que les fabricants de voitures diesel qui ne sont pas très honnêtes …).

Par défaut, chères étudiantes, étudiants et personnels de Lyon2, vous participez aux enquêtes de Microsoft. Merci!

Alors tant pis pour mon attachement à participer à la vie collaborative de notre établissement, que ce soit pour la préparation de l’habilitation de nos futurs parcours, que ce soit pour certains jurys, conseils de département, de la documentation, etc.

Je refuserai désormais de participer aux réunions via Teams considérant que nos solutions internes ou celles proposées par nos réseaux universitaires (comme Rendez-vous de Renater ou les instances de Big Blue Button de notre université sont assez adaptées à nos besoins élémentaires, même si je vous le concède, qu’actuellement ces solutions ne permettent pas de choisir un élégant ou rigolo papier peint qui s’afficherait en arrière plan de ma visio (qu’en général je désactive rapidement).

Vous comprendrez que pour ces raisons je n’assisterai pas à vos réunions publiques pour la campagne électorale qui se déroulent actuellement au sein de notre université et organisées sur Teams par votre équipe de campagne de la liste Agir2020 …

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17 réponses à Je ne suis pas bien dans la Teams, billet ouvert à la présidence de l’université Lyon2 et la direction de l’ICOM

  1. Arnaud Masson dit :

    Jolie démonstration que je n’hésiterai pas à citer en exemple.
    Merci et bon courage dans cette lutte de longue halaine que nous devons mener sur tous les fronts.

  2. Monsieurb dit :

    Bonjour,
    Vous auriez un argumentaire pour Zoom , Aussi très utilisé dans les plateformes politiques et associative, tout aussi intrusive et s’autorisant à conserver des enregistrements des réunion à sa discrétion..

    A priori les outils libres sont pour les autres, même si ils ont été financé dans ce but bien avant les confinements mais jamais utilisé par ces décideurs ! Aucun respect.

    • Je n’ai pas encore consacré de temps à zoom, car je ne cherche pas à m’exposer à ce type de plate-forme tant que je peux m’y soustraire. Au-delà d’un avis sur une interface aperçue que personnellement, je trouve de loin assez “éclatée”, les infos que j’ai croisé ne sont pas très enthousiasmantes. Par exemple https://www.01net.com/actualites/zoom-5-bonnes-raisons-de-ne-pas-utiliser-ce-service-de-visioconference-1888182.html Mais l’article date de quelques mois et il y a eu du mouvement. Sur certains points, notamment le chiffrage de bout en bout y compris pour les utilisateurs gratuits, il y a eu des allers-retours. Selon moi le syndrome “diesel-gate” des constructeurs de voiture aura un jour son pendant “cloud-gate”.

      L’argument “Zoom” en association est souvent lié au nombre de personnes pouvant participer fonctionnellement à une réunion. Il semblerait que meet.jit.si ou bigbluebutton puisse sur des serveurs réglés correctement encaisser des charges de 50 à 100 participants et participantes (sans les cams … inutiles avec une telle foule). Mais à cette recherche de réunion de masse, je pense qu’il faut envisager d’autres dispositifs, car un truc conversationnel à 50, ça ne marche pas forcément très bien pour distribuer la parole. Il serait peut-être plus opportun d’avoir des dispositifs mixant streaming, chat et connexion audio éphémère. (Je ne désespère pas qu’avec certaines fonctionnalité de peertube 3 combiné a du jitsi ou de l’OBS, on puisse trouver des ruses adaptées pour faire converger éthique et débat synchrone confortable.

  3. Alain Imbaud dit :

    Bonjour,

    Juste une précision pour BigBlueButton, Octopuce a pu tester le logiciel sur leurs serveurs et en a publié les résultats :
    https://www.octopuce.fr/retour-dexperience-sur-bigbluebutton-a-fort-charge/

  4. Encolpe dit :

    Salut Vincent,

    Pour Rendez-Vous (autrement appelé Jitsi), nous faisons régulièrement des réunions à plus de 20 sans que cela pose problème avec partage d’écran et chat. Et nous sommes allée au dessus de 40 à plusieurs reprises.

    Règle n°# : quand on pose un problème, mettre en avant une solution.
    Règle n°#+1 : montrer qu’il y a une solution avant d’exposer le problème

    😉

  5. Monsieurb dit :

    au sujet de “cloud-gate” il s’agirait de contourner un texte de loi
    par exemple la pub et la donnée personnelle à la je t’aime moi non plus réglementaire.

    https://www.pixeldetracking.com/fr/google-tag-manager-server-side-tagging

    • Mais c’est juste monstrueux. En gros google se transforme en pubeur et traceur masqué. Primo il planque les collecteurs et violeurs de vie privée, deuxio, il vitrifie les extensions d’auto-défense qui limitaient le harcèlement! On vit un époque formidable!

  6. Charly dit :

    Bonjour,

    Petite précision, Teams fonctionne parfaitement sous Linux avec Chrome. Celui-ci consomme bien moins de ressources que le client Teams.
    Je ne remet pas en question votre avis et n’en avance pas non plus, que ce soit pour Teams ou pour Chrome. Je tiens juste à préciser que techniquement, il existe une autre solution que le client Teams.

    Bonne journée.

    • Oui, mais forcément en bon libriste je n’utilise pas chrome (mais n’ai pas testé avec chromium). Quoi qu’il en soit on a un soucis d’interopérabilité et tout un parcours qui malgré tout incite systématiquement à utiliser le client persistant. Ce n’est pas juste un problème technique, ce sont les pratiques de soumission aux adhérences par harcèlement continu qui sont détestables (et les pratiques sociales qui vous y exposent).

  7. Bob dit :

    Même combat au sein de l’inserm. On nous force à utiliser tous les produits Microsoft.

    • Valissant dit :

      L’inserm, ça ne serait pas cette infrastructure publique mise à disposition des grandes firmes principalement pharmaceutiques pour leurs recherches en soumettant nos meilleurs chercheurs à leurs décisions?
      Un certain Benveniste (la mémoire de l’eau pour démontrer le pouvoir de l’homeopathie) en avait fait les frais, plus grillé qu’au barbecue, alors qu’il était au niveau Nobel (avant cette expérience personnelle).

      • Je ne vois pas le rapport avec l’Inserm. Dans ce billet je pointe principalement le manque d’effort techno-pratique qui conduit à considérer que l’outil et sa production/appartenance n’impacte pas la construction de la pensée et son affranchissement à des logiques socio-économiques.

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